Porsche 917K/81, Bob jette l'éponge

Pour l’édition 1981 des 24 heures du Mans, les Frères Kremer décident de reconstruire une Porsche 917 à partir des plans fournis par l’usine Porsche. Le châssis est totalement neuf. Une simulation informatique donne un temps théorique de 3.30 au tour. Performante, fiable et peu gourmande, la 917 sauce Kremer parait en mesure de jouer les premiers rôles.

 

Pourquoi une voiture interdite fin 1971 est-t-elle autorisée à revenir en compétition ?

A partir de 1972, afin de mettre un frein aux performances, les prototypes d’une cylindrée supérieure à 3L sont interdits. Les 917 et 512 sont rentrées dans les musées et ont laissé la place aux Matra, Alfa Romeo, Lola  et Ferrari 312. Courant 1979, le règlement est à nouveau corrigé et la barrière des 3 Litres est supprimée.

Par rapport à la version d’origine, la section des tubes est augmentée

Côté mécanique, le 4.5 L d’environ 500ch sera utilisé aux essais, le 4.9 L d’environ 550ch sera installé pour la course.

La boîte de vitesses n’a que 4 rapports, il s’agit du modèle déjà éprouvé sur  la 917 Canam.

Coté pneus, il s’agit de Dunlop 15’5’’ contre 19’ voir 22' durant les années 70. 

Poids 893 kg

 

26 mai 1981 La Porsche 917K/81 jaune aux couleurs Malardeau effectue ses premiers tours de roues sur le petit circuit du Nurburgring. Bob Wollek, Xavier Lapeyre et Guy Chasseuil réalisent une vingtaine de tours.

 

Le pesage

Inscrite dans un 1er temps dans la catégorie des voitures fermées, la 917 la voiture ne satisfait pas à la réglementation à cause de largeur entre les montants de pare brise. On réalise alors une découpe dans le toit pour faire passer la voiture dans la catégorie des voitures ouvertes. 
 

1ere séance d'essai

La première séance d’essais fut pour Bob Wollek une séance de travail. « Nous avons connu quelques problèmes de mise au point ». La Porsche 917 qu’il pilote avec Guy Chasseuil et Xavier Lapeyre en est quasiment à ses premiers tours de roues. Jusqu’à ce jour, la 917 Kremer n’avait pas tourné depuis le baptême du Nurburgring.

 

Bob Wollek : « Il fallait trouver le meilleur calage aérodynamique pour obtenir la plus grande vitesse possible dans la longue ligne droite des Hunaudières. Notre fin de séance a été contrariée en outre par des ennuis de moteur. Tous les cylindres ne donnaient plus la pleine mesure de leur puissance »

Avec un temps médiocre de 3.53.51, la 917 concède près de 25 secondes sur un tour de piste face aux 936, un véritable gouffre. 

 

2eme séance d'essai

"Pour la seconde séance d’essai, le premier moteur de 4,5L sera remplacé par celui de 4,9L, si bien que nous devrions occuper sur la grille de départ une place plus conforme aux possibilités de la voiture. Nous avons souffert d’un problème de pointe de vitesse. Dans la ligne droite des Hunaudières, il nous manquait 40 km/h, lors de la première séance, nous pensions que ces ennuis étaient provoqués par un manque de puissance du moteur".

"Pour la deuxième séance, après le montage du nouveau moteur, nous pensions que c’était un problème d’arrivée d’essence. En fait, les techniciens de l’usine Porsche avaient éprouvé les mêmes problèmes lors de la mise au point des premières 917. Ils pensent que la carrosserie est trop enveloppante au niveau du moteur, l’empêchant ainsi de respirer. D’ores et déjà, nous avons raccourci les rapports de boite et nos mécaniciens ont percé de nombreuses ouïes dans le capot arrière. Notre handicap est celui de ne pas avoir fait suffisamment d’essais avant les 24 heures" commente Bob Wollek.

Bob Wollek a réalisé le meilleur chrono de l’équipe en 3.46.54 (216,534 km/h). Il impressionne le public par ses freinages tardifs au niveau de Mulsanne ou il aborde le virage à la façon d’un rallyman. « Il fallait bien attaquer, car nous étions menacés par la non qualification».

24h lemans 1981 - Porsche 917K/81 no 10

 

Avec le 18eme temps des essais et une vitesse maxi qui plafonne à 290 km/h, la Porsche 917 jaune aux couleurs des résidences Malardeau n’est plus parmi les favorites.

 

La course

15 heures, le calvaire de Bob Wollek commence. Malgré son talent et sa vitesse de pointe reconnue, il concède en moyenne 15 secondes sur la tête de la course à chaque boucle.

Porsche 917K/81 no 10 - Le Mans 1981

Les performances ne sont pas là, à cela va s’ajouter une déconvenue au niveau de la consommation.

 

15h54 On avait programmé un ravitaillement toutes les 65 minutes mais après 54 minutes de course, il faut se rendre à l’évidence, le réservoir est vide. Lapeyre prend le relai au volant.

16h00 Après une heure de course, la numéro 10 pointe en 13ème position.

16h35 Lapeyre ravitaille

17h00 La Porsche 917 est 12ème.

17h23 Lapeyre ravitaille et cède le volant à Chasseuil.

18h00 la voiture est 9ème

18h29 La 917 est en panne d’essence et Chasseuil revient à la poussette. Lapeyre n’est pas prêt et Bob Wollek anéanti par la mort de son ami Lafosse refuse de le remplacer au volant. Le ton monte

18h35 Chasseuil repart pour 2 boucles le temps que Lapeyre se prépare.

18h42 Retour au stand, Chasseuil victime de la chaleur dans l’habitable et épuisé par la poussette perdra connaissance. Lapeyre reprend le volant

19h00 La voiture est 20ème

19h54 Ravitaillement. Le ton monte une nouvelle fois à l’intérieur du stand et pour Bob Wollek qui doit prendre le volant, la coupe est pleine.

 
Bob Wollek quitte le circuit sur le champs et regagne sa maison de Berstett..

"A vingt heures, j’en ai eu assez. J’ai décidé d’arrêter la course. J’étais prêt à prendre le maximum de risques calculés… mais je n’avais pas envie de mourir au volant pour rien. Depuis le départ, j’avais un pressentiment funeste. Durant les premières heures, j’ai essayé d’écarter cette image. La mort de mon ami Jean-Louis Lafosse avec lequel j’avais débuté en 1968, l’a fait rejaillir dans mon esprit. Mais ce n’est pas seulement cette inquiétude qui fut à l’origine de mon renoncement. La voiture marchait mal. Théoriquement, elle aurait du avoir deux points forts : sa vitesse de pointe et sa faible consommation d’essence. En fait, elle roulait à 50 km/h moins vite que les 936 et brûlait deux fois plus de carburant et puis notre équipage n’était pas homogène. Chasseuil et Lapeyre ne sont pas des professionnels à ce niveau. Ils ne roulaient pas assez vite et ne comprenaient pas assez la course. Je ne voulais pas prendre de risques pour eux. Au moment où je suis parti, nous étions 23ème ou 24ème. Cette place ne m’intéresse pas. C’est la première fois que j’ai eu cette réaction de renoncement. Elle m’a fait mal au cœur pour l’équipe qui m’entoure. Mais à 37 ans, je n’ai plus envie de mourir en course."

 

Ce renoncement aura-t-il des conséquences ?

"Non, dimanche prochain je conduirai ma Porsche 935 en championnat d’Allemagne à Wulsdorf ".

Et les 24 heures ?

"L’an prochain peut-être avec une voiture expérimentée par des essais et avec des coéquipiers professionnels".

 

Guy Chasseuil et Xavier Lapeyre continuent sans le pilote Alsacien.

Remonté en 14ème position, Lapeyre, gêné par une 935, fait un tête à queue au niveau du virage Ford. La voiture touche le rail. L’arrière est endommagé.

20h12 Lapeyre rentre au stand pour faire réparer le capot arrière, l’intervention coute 32 minutes.

21h00 25ème position au classement général

21h28 Ravitaillement.

21h43 Suite à une fuite d’huile, le moteur casse. C’est l’abandon

Triste sortie pour cette fabuleuse voiture, imputable à un manque de préparation. Sans doute la course de trop pour la légendaire 917.

 

Bibliographie

Auto Hebdo no 271

Dernières Nouvelles d'Alsace. Propos recueillis par Benard Delattre 

 
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