Il est certe difficile de comparer les pilotes, surtout s'ils ont participé à l'épreuve Mancelle à des époques différentes, mais Jacky Ickx est un battant, un as sous la pluie, celui qui fait toujours trembler l'écurie adverse, celui qui calcule et qui s'impose en fin tacticien, c'est l'homme des remontées impossibles, celui qui accumule les records du tour une nuit durant, qui pointe aux avants postes au petit matin et qui s'impose sur la ligne d'arrivée. Il ne baisse jamais les bras, jamais vaincu et très souvent gagnant, que ce soit à Spa, au vrai Nurburgring ou au Mans.... hommage au plus grand.
1961, Jacky Ickx débute par le trial et utilise le pseudonyme de son papa journaliste. A 16 ans, il est pilote usine Zundapp et devient champion de Belgique en 50cc devant un certain Roger De Coster.
1964, Il débute la compétition automobile au volant d'une BMW lors d'une course de côte. Ford Belgique lui confie ensuite une Cortina Lotus. Il participe entre autres à une comptétition internationale à Budapest. Il y fait des merveilles et Ken Tyrrell, déjà connu pour son flair de détecteur de talent, lui propose un essai.
1966, A l'issue de son service militaire, il intégre l'écurie Matra Tyrell. Il ne s'attarde pas longtemps en formule 3 (3 courses, 3 podiums). En tourisme, Il remporte entre autres, les 24h de Spa Francorchamps sur une Bmw 2000 TI. Cette même année, il fait ses débuts aux 24 heures du Mans sur une Ford GT40.
1967, Il devient le co-équipier de l'illustre Jacky Stewart en Formule 2 et va cotoyer les meilleurs pilotes du moment. Sur le grand Nurburgring, F1 et F2 courrent ensemble. Jacky Ickx réalise le 3eme temps absolus des essais au volant de sa modeste F2. Le plateau F2 partant derrière les F1, il fait une remontée spectaculaire et remonte jusqu'à la 4ème place avant qu'une rotule de suspension ne casse et le contraigne à abandonner. Il remporte le championnat d'Europe de F2. En sport proto, il pilote une Mirage M1 Ford (gt40 aux couleurs gulf de John Wyer). Lors des 1000 kms de Spa, il pleut dans les Ardennes. La concurrence est relevée avec notamment les Ferrari P4 officielles de Mairesse Scarfioti, la Chaparral de Phil Hill ..etc. Sur un circuit d'homme, dans des conditions difficiles, le 30 avril 1967, Jacky Ickx prend la tête dés le départ et remporte sa 1ere grande course en sport proto. Il y en aura rapidement d'autres, 1000 kms de Paris, 9 heures de Kyalami...etc... Fin 1967, il débute en F1 au volant d'une Cooper. Dés sa première course, il rentre dans les points à une excellente sixième place. Franco Lini, directeur sportif de la Scudéria le remarque et le recommande à Enzo Ferrari. A 23 ans, Jacky Ickx débarque chez Ferrari et entame sa 1ere saison de F1. Il passe du statut de débutant sur une Cortina à celui de pilote de F1 chez Ferrari en 3 ans, son ascension est fulgurante.
1968, Il remporte sa 1ere victoire en F1 à Rouen, lors d'un Grand Prix de France disputé sous l'eau. C'est la 1ere victoire d'une formule 1 équipée d'ailerons. Il confirme qu'il est un acrobate dans les conditions de pluie et qu'il est l'homme des conditions difficiles (pole position au Nurburgring). Jacky Ickx a du caractère et les rapports de "Pierino la peste" avec le grand Enzo sont délicats. Il termine 4ème de son 1er championnat mais ce sera le divorce avec la Scuderia. En sport Proto, il reste fidele à John Wyer. Il gagne à Kyalami, Spa (sous l'eau), Watkins Glen et Brands Hatch.
1969, Il rejoint Brabham. Mais Jack Brabham, patron pilote, joue avant tout sa carte personnelle. Jacky Ickx remporte les GP d'Allemagne et du Canada. Il termine à la seconde place du championnat mais quitte Brabham et retourne chez Ferrari. En sport proto, il reste fidèle à la GT40 aux couleurs Gulf.
Il entre dans la légende des 24 heures le 15 juin 1969
Avec Jacky Oliver, ils ne réalisent que le 13 eme temps des essais à 15 secondes de la pole, et ils ne partent pas vraiment favoris face aux monstrueuses Porsche 917. Ce sera à priori une lutte entre Porschiste Siffert, Stommelen, Elford, Larousse....
Le jeune pilote Belge va déjà faire parler de lui avant le départ de l'épreuve. Soucieux de la sécurité, il n'hésite pas à affronter l'Aco. Traverser la piste en courant, puis s'élancer sans même prendre le temps de fixer la ceinture de sécurité est une prise de risque inutile. A cette époque, les vitesses atteintes approchent les 370 km/h et en 1968, Mairesse, victime d'une porte mal fermée était sorti dans les Hunaudieres dés le 1er tour sans avoir pris le temps de boubler son harnais. La notion de sécurité pouvait surprendre venant d'un jeune pilote. Jacky Ickx est isolé face à la direction de course, il ne reçut pas même l'appui des autres pilotes. Le temps et les incidents du 1er tour lui donneront raison. Traversant la piste en marchant d'un pas tranquille pour protester contre le départ "type Le Mans", Jacky Ickx s'élance bon dernier.
La suite ? Jean de la Fontaine l'avait prédit. Les Porsche vont dominer avec insolence les 21 heures du Mans... Pourtant au fil des heures, les ennuis ne vont pas épargner les voitures allemandes. La Ford pointait en 7e position à la 4e heure, s'emparait de la 3e place peu après la mi-course et enfin de la seconde place à trois heures de l'arrivée. Une nouvelle course commence...
Gérard Larrousse remonte sur la Ford et se maintient dans son sillage, mais Porsche décide de laisser le dernier relais à l'expérimenté Hans Herrmann. Pendant la dernière heure, le suspense est à son comble. Ickx et Herrmann ne seront jamais séparés de plus de 2''5 et échangeront leurs positions pas moins de huit fois. La 908 est plus rapide, plus légère, accélère mieux mais ses freins sont usés alors que la GT 40 peut compter sur des plaquettes neuves, la souplesse de son gros V8 et l'audace de son pilote...Dans le dernier tour, Jacky Ickx en grand tacticien, laisse passer la Porsche à l'entrée des Hunaudières pour profiter au maximum de son aspiration dans la ligne droite, puis se porte à sa hauteur dans la courbe avant de la passer au freinage de Mulsanne. Dans les stands et les tribunes, la tension est à son comble. La GT 40 déboule avec une mince avance dans la chicane Ford, accélère et franchit la ligne avec 120 mètres d'avance ! Ainsi débute le 1er épisode d'une longue série.
1970, Il remporte trois GP et termine 2eme du championnat derrière Jochen Rindt qui, victime d'un accident fatal à Monza deviendra champion du monde à titre posthume. Lors des 24 heures, au volant de la Ferrari 512, il est un moment 2eme, il sortira hélas de la route fauchant malheureusement un commissaire.
1971, La fiabilité de la 312 n'est pas au rendez-vous, il remporte un GP et termine 4eme du championnat F1. En endurance, sa Ferrari 512 est malmenée par les monstrueuses Porsche 917.
1972 En F1, il termine à nouveau 4ème du championnat. En sport proto, au volant de la Ferrari 312P, il écrase le championnat du monde en remportant 6 victoires mais la Scudéria fait l'impasse sur Le Mans.
1973 L'année est difficile, Tyrell et Lotus lui mènent la vie dure et il quittera le navire Ferrari avant la fin de la saison. En sport proto, la lutte contre Matra est difficile. En lutte pour la victoire au Mans, il est contraint à l'abandon en vue de l'arrivée. Il remportera les 1000 km de Monza et une fois de plus les 1000 km du Nurburgring.
1974 En F1, il pilote pour Lotus. Hélas, la Lotus est moins compétitive que la Ferrari. Il va remporter son dernier GP, à Brands Hatch.... sous la pluie. Dans les années qui suivirent, Jacky Ickx ne pilotera plus de F1 compétitive. Des voitures de second plan, beaucoup d'abandons, beaucoup de désillusions. Il sera appeler en 1979 par Guy Ligier en remplacement de Patrick Depailler, mais la motivation n'est plus là. Pour revenir à 1974, en Proto, il remporte les 1000 km de Spa.
1975 Si la grande période F1 est terminée, la grande période Le Mans commence. Il retourne dans l'écurie de John Wyer et fait équipe avec Derek Bell au volant d'une Mirage. Il signe la pole position et remporte sa 2eme victoire au Mans sans grande adversité.
1976 Le couple Porsche 936 / Ickx fonctionne à merveille. Au volant de la 936, il signe la victoire à Monza, Imola, Mugello et Vallelunga. Pour les 24 heures du Mans, il fait équipe avec Van Lennep. Malgré un changement de turbo qui le pénalise d'une demi heure, Jacky Ickx signe son 3ème succès au Mans.
1977 Toujours au volant de la 936, il gagne à Watkins Glen, Silverstone et Brands Hatch. Pour les 24 heures, il fait équipe avec Henri Pescarolo, autre grand maître de l'endurance, au volant de la Martini Porsche n°3. En face, Renault a mis les moyens pour s'imposer. La grande confrontation s'annonce explosive. Tout débute très mal pour Porsche, Peu après 17h00, la seconde 936 pilotée par Haywood Barth s'arrête au stand pour un changement de pompe à injection. Elle perdra la bagatelle de 33 minutes et repart en 49eme position. Devant, Ickx tente de suivre le rythme d'enfer imposé par Jabouille sur la Renault, mais le moteur de sa Porsche rend l'âme dans la 3eme heure de course, laissant 3 Renault en tête. Jacky Ickx avait été nommé suppléant sur la 2eme Porsche, il change donc de baquet et va venir épauler Barth et Haywood sur la Porsche attardée. A 20h00, ses équipiers lui laissent le volant en 17eme position. Jacky Ickx fait le forcing, il possède 6 tours de retard mais il reprend en moyenne 6 secondes au tour à l' Alpine de tête. Ickx ne chome pas, Il va battre à 5 reprises différentes le record du tour. Il va pleuvoir toute la nuit. Devant lui, deux des Renault abandonnent. A 7h00 du matin, Ickx est remonté en 2eme position et met la pression sur la voiture de tête. Coup de théatre, solidement installé en tête de la course, l'Alpine n°9 de Jabouille fume et abandonne. A 9h31, Ickx est en tête de la course. En véritable seigneur de la course automobile, Jacky Ickx, après avoir piloté 12 heures à décidé de laisser finir ses coéquipiers, refusant l'apothéose qui lui semblait promise. La Porsche est à l'agonie, fonctionnant sur cinq cylindres, elle franchi péniblement la ligne d'arrivée. Jacky Ickx remporte sa 4ème victoire au Mans et sans doute l'une des plus belles victoires de toute sa carrière.
1978 Renault a retenu la leçon de 1977 et a minutieusement préparé son affaire. Jacky Ickx réalise cependant la pole. La course débute mal, il s'arrête dés le 2eme tour, confronté à des soucis d'accélérateur. A 21h00, il faut changer le pignon de 5eme. Jacky Ickx change de bacquet et rejoint Bob Wollek sur la 936 la mieux placée. Ils remontent en 2eme position. A 9h00 du matin, il faudra stopper pour remplacer le pignon de 5eme. 37 minutes d'arrêt. Le pilote de la porsche donnera le maximum, reprenant 2 tours à la Renault. Il aura conduit 14 heures et perdu 6 kg…. Il terminera finablement à une très honorable 2ème place.
1979 Il gagne les 6 heures de Dijon et part grand frand favori des 24 heures au volant de la 936 aux couleurs Essex. Il bataille en début de course contre Wollek mais victime de plusieurs soucis liés à un manque de préparation de sa voiture, il va retrograder au classement. Vers 3h00 du matin, Jacky Ickx s'arrête dans les Hunaudieres. Il change la courroie de pompe à injection et repart. Il sera mis hors course à 7h00 du matin pour aide extérieure (des mécaniciens Porsche lui avait jeté les pièces détachées).
1980 Il fait équipe avec Joest au volant d'une 936 rebaptisée 908. Son début de course est contrarié par un moteur qui ratatouille à cause de la pluie. La pluie va cesser et sa Porsche prendra le commandement à 20h00. Il domine la course en prenant 10 secondes à ses poursuivants à chaque tour. Hélas, comme l'année précédente, il doit changer sa courroie de pompe à injection. Il repart 7eme à 3 tours des Rondeau et des 935. A 1h30, il est remonté en 2ème position avant de prendre la tête à mi-course. A 10h00 du matin, la Martini Porsche rentre au stand, il faut changer le pignon de 5ème. Cette opération va couter 5 tours. Malgré la pluie et un grand Jacky Ickx, il ne pourra pas refaire la totalité de son retard. Il franchira la ligne d'arrivée à la 2eme place, à seulement un tour de la Rondeau.
1981 Il partage le volant de la Porsche 936 aux couleurs Jules, avec Derek Bell. Parti de la pole position, Jacky Ickx s'envole dés le départ. Il ne sera pas inquiété. C'est sa 5ème victoire au Mans.
1982 La paire Ickx/Porsche 956 est intouchable. Il remporte les manches de Spa, Fuji, Kyalami et Brands Hatch et devient champion du monde d'endurance. Au Mans, il signe la pole position. La porsche tourne comme une horloge et Jacky Ickx remporte sa 6ème victoire dans la Sarthe.
1983 Nouveaux succès au Nurburgring et à Spa. Au Mans, au volant de la 956, il s'élance de la pole mais dés le 1er tour, il se fait harponner par Jan Lammers. La passage par les stands pour controler la voiture lui coute près de 3 minutes. L'équipage Ickx/Bell rencontrera des soucis de boite de vitesse au milieu de la nuit. Mais Jacky Ickx et Derek Bell n'ont pas dit leur dernier mot. A 4 heures de l'arrivée, ils sont 2eme à un tour et demi des leaders. Ils récupèrent entre 7 et 20 secondes au tour, mais ce ne sera pas suffisant. Ils échoueront à 38 secondes de la 1ere place. Il remporte à nouveau le titre de champion du monde des pilotes d'endurance et dans un registre totalement différent, le Paris-Dakar.
1984 Victoires à Silverstone et Mosport mais pas de participation aux 24 heures.
1985 Victoires a Mugello, Silverstone et Selangor. Dernière participation au Mans, sur une Porsche 956 avec le fidèle Derek Bell. Après 3 heures de course, il faut hélas changer la boite de vitesse. L'arrêt dure plus d'une heure. Ils remonteront jusqu'à la 10eme place sur la ligne d'arrivée.
Jacky Ickx fera un retour au Mans en 1991, comme consultant pour le compte de l'écurie Mazda. Les Mercedes semblent invincibles mais elles vont connaitre tour à tour des problèmes mécaniques. La Mazda à moteur rotatif remportera l'épreuve.
Avec 6 victoires dans la Sarthe, le nom de Jacky Ickx reste associé aux 24 heures du Mans. C'est un grand Monsieur, une légende à lui tout seul. Son palmarès est exceptionnel. Il a lutté contre les plus grands à une époque ou beaucoup de ses adversaires ont payé de leur vie le prix de leur passion. Outre des qualités de pilote hors du commun, c'est un grand Monsieur. Un homme réfléchi, posé, et l'entendre parler de ses courses est un véritable régal. J'ai eu le privilège de passer le week-end du Mans 2003 dans le box du T2M Motorsport ou Vanina Ickx pilotait la Porsche. Jacky Ickx fit plusieurs visites. Rencontrer une telle légende du sport automobile fût un très grand moment.
Jacky Ickx |
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17 participations - 6 victoire(s) - 3 fois 2ème - 7 abandon(s). |
Résultats | Voiture | Pilotes | |||
1966 | Abandon | Ford GT 40 | N° 60 | Ickx, Neerspach | |
1967 | Abandon | Mirage M 1 | N° 15 | Muir, Ickx | |
1969 | 1er | Ford GT 40 | N° 6 | Ickx, Oliver | |
1970 | Abandon | Ferrari 512 S | N° 5 | Ickx, Schetty | |
1973 | Abandon | Ferrari 312 P/B | N° 15 | Redman, Ickx | |
1975 | 1er | Gulf Mirage GR 8 | N° 11 | Ickx, Bell | |
1976 | 1er | Porsche 936 | N° 20 | Ickx, Van Lennep | |
1977 | Abandon | Porsche 936 | N° 3 | Pescarolo, Ickx | |
1977 | 1er | Porsche 936 | N° 4 | Ickx, Barth, Haywood | |
1978 | Abandon | Porsche 936 / 78 | N° 5 | Pescarolo, Ickx, Mass | |
1978 | 2ème | Porsche 936 / 78 | N° 6 | Barth, Wollek, Ickx | |
1979 | Abandon | Porsche 936 | N° 12 | Redman, Ickx | |
1980 | 2ème | Porsche 936 / 80 | N° 9 | Joest, Ickx | |
1981 | 1er | Porsche 936 / 81 | N° 11 | Ickx, Bell | |
1982 | 1er | Porsche 956 | N° 1 | Ickx, Bell | |
1983 | 2ème | Porsche 956 | N° 1 | Bell, Ickx | |
1985 | 10ème | Porsche 962 C | N° 1 | Mass, Ickx |