André Haller, c’était un baroudeur de la course automobile. Un des derniers survivants d’une race de chevaliers preux et courageux, aujourd’hui en voie d’extinction : les gentlemen-drivers comme on les appelle un peu ironiquement aujourd’hui. Ils avaient animé l’âge d’or de l’automobile jusque vers les années 1965 lorsque le professionnalisme et la publicité commencèrent à crisper les relations entre hommes.
Après une participation aux 2 heures de l'Aco le 24 mars 1974 puis une première participation aux 24 heures du Mans en 1975 marquée par une victoire de la classe 2-2,5L, André Haller est de retour dans la Sarthe. "Pour mon plaisir seulement, pas pour le résultat".
Crédité d'un temps de 4'46, André Haller ne réalisera pourtant pas un temps suffisant aux cours des deux séances d'essais pour se qualifier. Il sera cependant 'repêché' en dernière minute le samedi matin par l'organisation de course.
Depuis le départ, la Datsun no 73 a été conduite par Claude Buchet et Luc Favresse. La chaleur ayant particulièrement accablé les deux pilotes, la décision fût prise de confier le volant à André Haller peu avant 21h00.
Quelques minutes avant 21h00, la Datsun no 73 ravitaille et André Haller s'élance pour son 1er tour, malheureusement aussi, son dernier.
Samedi 12 juin 1976, 21h02
Selon un communiqué de la direction de course,
André Haller a perdu le contrôle de sa voiture à la sortie de la courbe des Hunaudières. Après être parti en tête à queue et avoir violemment heurté les rails de protections sur le côté droit de la piste, la voiture a pris feu et s'est immobilisée 100 mètres plus loin à gauche de la chaussée.
Malgré l'intervention rapide des services de sécurité et du médecin ré-animateur, le pilote est décédé à l'hôpital des suites d'un enfoncement de la cage thoracique et de ses très graves brûlures.
Un malaise lié à la forte chaleur et aux vapeurs d'essence ? une erreur de pilotage ? un problème pneumatique ? mécanique ? personne ne pourra répondre, la Datsun est totalement carbonisée.
A 52 ans, André Haller paie de sa vie sa passion pour la compétition automobile.
La cérémonie religieuse eut lieu le Jeudi 17 juin 1976 à 10h30 en la Cathédrale de Strasbourg.
Dans la course automobile moderne, où tous les coups sont permis pour arracher au chronomètre le dérisoire centième de seconde qui mène au triomphe, André Haller était resté un homme à part : héritier et défenseur de la tradition noble des premiers « sportmen » qui pratiquaient l’automobilisme comme on joue au tennis.
André Haller n’acceptait aucune compromission, aucune combine. Il entendait vivre pleinement sa passion, libre et heureux.
Il incarnait la symbiose parfaite de l’adjudant-chef de l’armée de l’air qu’il a été dans sa jeunesse en Afrique, du gentleman-driver qu’il est resté jusqu’à samedi 21h30, du conteur à la voix grave qui égaye une soirée, du restaurateur dominant un bar rempli d’icones multicolores qui retracent sa passion intense de pilote automobile et d’aviation, de collectionneur de mécaniques rutilantes et surtout de cet ami fidèle qui, derrière son regard grave, anxieux et profond, répondait toujours présent lorsqu’il fallait rendre un service.
André Haller, c’était un baroudeur de la course automobile. Un ancien, l’un des derniers survivants d’une race de chevaliers preux et courageux, aujourd’hui en voie d’extinction : les gentlemen-drivers comme on les appelle un peu ironiquement aujourd’hui. Ils avaient animé l’âge d’or de l’automobile jusque vers les années 1965 lorsque le professionnalisme et la publicité commencèrent à crisper les relations entre hommes.
Plus qu’un pilote, André Haller qui avait débuté par le moto-cross en 1947 était un esthète de la chose mécanique. Toutes les voitures qu’il a conduites – Du coupé Olympia de ses débuts jusqu’à la Datsun 260 Z qui l’a arraché à notre affection, en passant par la Simca Grand Sport de 1956, le Spider Porsche 1500 avec lequel il fit ses premières armes en circuit à Djibouti et au Sénégal, l’Austin Healay des premiers Rallyes de Lorraine, la fameuse Mercedes 300 SL qui se déplisse comme un papillon et dont il ne s’est jamais séparée même après ses exploits sur les routes des Vosges à l’occasion des Rallyes de Lorraine, courses de côtes de Marron et Turckheim, de la Cooper 1300S avec laquelle il termina 12ème d’un terrible marathon de la route, l’une des compétitions les plus éprouvantes de l’histoire des Rallyes ou encore la superbe Datsun 240Z qu’il alignait chaque année à Wissembourg, Abreschviller, Turckheim, Montlhéry et Magny Cours ses courses préférées, toutes ses voitures étaient toujours remarquablement préparées.
André Haller aimait aussi les grandes épreuves. Le Mans était pour lui un Himalaya qu’il n’atteignit que l’an passé. Près de 30 ans après ses débuts, avec le jeune espoir Alsacien Benoit Maechler et l’expérimenté rallyman allemand Hans Schuler, vainqueur de l’East African Safari, il conduisit la Datsun qui l’a tué cette année, à la 26ème place.
Il aimait aussi le Rallye Monte Carlo. Deux fois il avait cherché à rejoindre la principauté, sans succès. Une fois avec Jean-Daniel Jakubowski, l’aventure se termina en Pologne. L’autre fois avec Christian Lorang, elle s’arrêta brutalement au Burzet. Les amateurs – l’amateur qu’il est resté jusqu’au bout – avaient été injustement bannis.
André Haller parlant avec passion de ses exploits même les moins glorieux, parce qu’ils lui permettaient d’évoquer la chose qu’il adorait par-dessus tout : la belle mécanique. Les résultats, ça ne l’intéressait pas beaucoup. Il n’était pas avide de victoires et ne prenais jamais aucun risque insensé pour essayer d’en cueillir une.
Voilà pourquoi tous ceux qui connaissaient « Dédé » ne comprendront jamais, n’accepteront jamais son départ pour l’autre monde.
Les dernières Nouvelles d'Alsace - Bernard Delattre
Photo Ina. (Lors de la Course de côte de Turckeim 1975 le 29 juin 1975 sur la Datsun no 119)
Victoire dans la classe 2000-2500 en 1975