Le Mans, 10 et 11 juin 1978

La revanche de 1977 ? Après une édition 1977 indécise ou le suspens dura jusqu’à la fin, Renault veux sa revanche avant de se concentrer totalement sur la F1.

 

 

Si les A442 furent performantes en 77, elles furent toutes victimes d’ennuis de moteur laissant la victoire à Porsche. Mais chez Porsche, on doit surtout la victoire de 1977 au grand Jacky Ickx, sans quoi, une Mirage aurait empochée le gros lot.

Le plateau

Chez Renault, l’origine du mal ayant affecté les moteurs en 1977 est connue. La rupture des pistons des Alpines était liée à un problème d’inertie qui entrainait une flexion de l’axe des pistons.

Renault a fait de nombreux essais, au Castellet mais aussi aux Etats-Unis sur une piste d’essais dotée d’une longue ligne droite pour reproduire le comportement dans les Hunaudières (50s à fond de 5eme). Pendant les essais menés au Castellet, Patrick Tambay est chronométré à 378 km/h. Près de 30 000 kms d’essais au total !!!

Sur le plan des nouveautés, Renault présente une nouvelle voiture dénommée A443. La cylindrée de son moteur a été portée de 2000 à 2140 cc. Outre une meilleure fiabilité, les modifications les plus visibles concernent la carrosserie. Une bulle, un saute-vent  ….. qui donne l’impression à la Renault d’être une voiture quasi fermée. Le pilote accède dans la voiture en ouvrant cette bulle vers l’avant. 4 voitures sont engagées, une nouvelle A443 dotée d’un moteur de 2140 cc pour Jabouille et Depailler (remplaçant Tambay blessé), une A442b aux mains de Pironi Jausssaud, une A442A pour Jarier Bell, ainsi qu’une autre A442 privée aux couleurs Calberson pour Ragnotti Frequelin et Dolhem.

Chez Porsche, on engage 3 modèles 936 pilotées par Ickx Pescarolo, Wollek Barth et Haywood, Gregg et Joest. Dans la catégorie ‘Silhouette’, Porsche présente un modèle 935. Monstre de puissance de 750 cv, du jamais vu au Mans. Surnommée ‘Moby Dick’, sa consommation est phénoménale et l’oblige à refaire le plein toutes les 40 minutes. Si les équipages des 936 sont au Mans pour la victoire, on peut penser que Stommelen animera surtout le début de la course.

Les 936 arborent une nouvelle carrosserie et un nouveau moteur à 4 soupapes par cylindre refroidi par eau. Plusieurs tests ont été menés sur le circuit Paul Ricard. Le moteur a tenu 45 heures.

Outre Porsche et Renault, GTC Mirage engage deux voitures de construction britanique à moteur Renault V6 Turbo. Laffite Leclere et Posey Schuppan les conduiront. Alain De Cadenet a vendu sa voiture de 76 et loué celle de 77. Il sera sur la ligne de départ avec son fidèle équipier Chris Craft sur une nouvelle voiture à base Lola. Toj et Ibec Hesketh complètent le plateau.

 

Le pesage

« Moby Dick » conforme ou pas ? Depuis le début de la saison, la 935 roule avec des portes recouvertes d’un habillage aérodynamique contraire au règlement. Autorisée, puis interdite, Porsche avait corrigé le tir en diminuant l’habillage de la porte sans pour autant respecter les règles. Les commissaires la jugèrent donc non conforme. Jurgen Barth qui représente l’écurie Porsche présente alors deux documents préalablement parafés par messieurs Schild, Frère et  Ugeux ( respectivement Président, Vice-président de la sous-commission des règlements techniques de la Commission Sportive Internationale et Président de cette dernière ) pour faire valider ces carénages. L’appendice aérodynamique est présenté comme le prolongement des ailes avant…..   La Porsche est finalement admise au départ. Bien que jouant avec les règlements plus ou moins flous, Moby Dick n’en respectait en rien l’esprit et nous étions à des années lumières d’une 911 de série.

 

Les essais

Dés l’ouverture des hostilités le mercredi, Jacky Ickx pulvérise le record du circuit en réalisant un temps de 3’27’6 soit 3 secondes de mieux que l’ancien record détenu par l’Alfa de Merzario. Chez Renault, Depailler est à 7 secondes. L’appui aérodynamique manque et l’optimisme à fait place au doute. Stommelen avec sa 935 relookée obtient le 2eme temps provisoire en 3.30.7

Le jeudi, les Porsche sont mises en configuration course. Chez Renault, on supprime les balais à l’avant du capot avant. Les performances sont en hausse et Depailler réalise un 3.28.4 plus conforme aux ambitions de Renault. Les pilotes de l’A443 souffrent de la chaleur sous la bulle et préfère ôter le nouveau dispositif aérodynamique. Pironi et Jaussaud le garde. Les Mirages sont loin, trop loin et en groupe 5, Fitzpatrick Hezemans Ludwig sont relégués à 16 secondes de Moby Dick……   

 

La grille de départ

1	Martini Porsche 936	5	Ickx	3.27.6
2	Renault Alpine A443	1	Depailler	3.28.4
3	Martini Porsche 935 ‘Moby Dick’	43	Stommelen	3.30.9
4	Martini Porsche 936	6	Wollek	3.35.2
5	Renault Alpine A442B	2	Pironi	3.35.7
6	Martini Porsche 936	7	Gregg	3.37.3
7	Renault Alpine A442A	3	Jarier	3.37.9
8	Renault Alpine A442	4	Ragnotti	3.42.7
9	Mirage Renault M9	10	Schuppan	3.45.8
10	De Cadenet Lola	8	Craft	3.46.2

 

Le départ

Jabouille réalise un départ fulgurant, et à la fin du 1^er tour il compte 12 secondes d’avance sur Ickx, Pironi, Jarier, Wollek, Shurti, Ragnotti, Leclere et Schuppan. Premier rebondissement dés le 2eme tour puisque Jacky Ickx s’arrête à son stand, accélérateur coincé. Sans véritablement trouvé l’origine du problème, on débranche la 2eme pompe à essence. Haywwod s’arrête également avec le même soucis. L’origine du problème est trouvée, c’est le câble d’accélérateur à main qui grippe. Ickx s’arrête à nouveau et on solutionne son problème. Devant, trois Renault sont en tête, Ickx est à 5’22.

Après 39 minutes de course, Moby Dick à le ventre vide… 120 litres consommés en 10 tours soit 80 L/100 km. Jabouille s’arrête à son tour, victime de vibration. On change pneus et pilote. Au 24eme tour, Depailler revient au stand, les vibrations continuent. On lui change les pneus avants et au 25ème tours les pneus arrières. Il est 7eme.

	Après 2 heures de course
1	Renault Alpine A442B	2	Pironi/jaussaud
2	Renault Alpine A442A	3	Jarier/Bell
3	Martini Porsche 936	6	Wollek/Joest/Barth
4	Renault Alpine A442	4	Ragnotti/frequelin/dohlem
5	Martini Porsche 935 ‘Moby Dick’	43	Stommelen/shurti
6	Mirage Renault M9	11	Leclere/Posey
7	Renault Alpine A443	1	Depailler/Jabouille
8	Mirage Renault M9	10	Schuppan/Laffite
9	De Cadenet Lola	8	Craft/De Cadenet
10	Martini Porsche 936	5	Ickx/Pescarolo
11	Porsche 935	44	Busby/Cord
12	Mirage Renault M9	7	Gregg/Haywood/Joest
13	De Cadenet Lola	46	Steve/Franay/Raymond

 

A 21h00, Ickx s’arrête au stand, Il faut changer son pignon de 5^ème. Peu de temps après, c’est le Turbo de la 936 d’Haywood/Gregg/Joest qui casse, 13 minutes seront nécessaire à son remplacement. Chez Porsche, commence alors le jeu des chaises musicales. Jochen Mass va venir épauler Pescarolo, tandis que Ickx remplacera Barth aux cotés de Wollek.

La Renault de Jabouille remonte et va reprendre la tête après 7 heures de course. Derrière, les positions ne vont guère changer jusqu’à la mi-course. Les vibrations connues sur la n°1 affectent toutes les Renault. C’est une usure inégale des plaquettes de freins qui déséquilibrent le freinage. 

22h35, premiers soucis chez Renault. Bell abandonne sur le circuit, le couple conique vient de lâcher. Derrière Wollek et Ickx remonte en 2eme position, ils sont à 2 tours. Est-ce un remake de 1977 ?  

	Après 12 heures de course
1	Renault Alpine A443	1	Depailler/Jabouille
2	Martini Porsche 936	6	Wollek/Joest/Ickx
3	Renault Alpine A442B	2	Pironi/jaussaud
4	Renault Alpine A442	4	Ragnotti/frequelin/dohlem
5	Martini Porsche 936	7	Gregg/Haywood/Joest
6	Martini Porsche 935 ‘Moby Dick’	43	Stommelen/shurti
7	Porsche 935	44	Busby/Cord
8	Porsche 935	90	Barbour/Redman/Paul
9	Mirage Renault M9	10	Schuppan/Laffite
10	Porsche 935	41	Gomes§Guarana/Amaral

 

La Porsche 936 n° 6 va connaitre des soucis au niveau du train avant. La Renault Calberson va devoir stopper pour changer le 3eme pignon de boite. 32 minutes d’arrêt.

A 9h00 du matin, la course s’agite. La 936 de Wollek/Ickx stoppe 37 minutes pour changer le pignon de 5^ème.

10h00 Jochen Mass sort de la piste dans la nouvelle portion et abandonne mais coup de théatre, Depailler casse le moteur de la Renault dans les Hunaudières. Jabouille ira épauler Ragnotti et Frequelin

	Après 20 heures de course
1	Renault Alpine A442B	2	Pironi/jaussaud
2	Martini Porsche 936	6	Wollek/Joest/Ickx
3	Martini Porsche 936	7	Gregg/Haywood/Joest
4	Renault Alpine A442	4	Ragnotti/frequelin/dohlem
5	Porsche 935	90	Barbour/Redman/Paul
6	Porsche 935	44	Busby/Cord
7	Martini Porsche 935 ‘Moby Dick’	43	Stommelen/shurti
8	Porsche 935	41	Gomes/Guarana/Amaral
9	Inaltera	71	Trisconi/Chevalley
10	Porsche Carrera	66	Lapeyre/Servanin/Verney

 

Les dernières heures de course furent longues pour Renault. Les problèmes de moteur de la N°1 allaient-ils se reproduire sur les autres voitures ? les pignons de boîtes allaient-ils résister ?

L’embrayage de la voiture de tête est malade et on demande à Didier Pironi d’effectuer les 2 derniers relais. Il possède 7 tours d’avance sur Jacky Ickx. Le pilote de la porsche  donnera le maximum, reprenant 2 tours à la Renault. Il aura conduit 14 heures et perdu 6 kg….

16h00 DiDi passe la ligne d’arrivée en vainqueur, totalement épuisé.

Renault s’impose devant Porsche. Une autre issue aurait été une véritable déconvenue pour la firme au losange.

La barre des 5000 kms est dépassée pour la 1ere fois depuis 1971 et l’époque des 917.

Moby Dick termine 8 ème. Outre son autonomie limitée, la voiture à été sujette à des problèmes de toutes sortes : du circuit de refroidissement à l'échappement en passant par les pompes à essence et à injection. Elle termine derrière trois autres Porsche 935 dont deux qui s'emparent des victoires en IMSA et groupe 5. Débuté un mois plus tôt la carrière de la Moby Dick s'arrête dans la Sarthe et rejoint le musée Porsche.

Mirage termine en 10eme position après de multiples soucis d’alternateur et de boite. Il faut se rendre à l’évidence, les privés n’ont aucune chance face aux véritables usines.